Les Bourses du travail


par M. Gustave de Molinari.

Correspondant de l’Institut, rédacteur en chef du Journal des Économistes


Appendice.

Note U

P. 142. — La création des Bourses du Travail en France.


Nous empruntons à la publication de l’Office du Travail sur le placement des ouvriers le résumé historique de la création des Bourses du Travail en France, après le renvoi du projet de M. Ducoux au Conseil municipal de Paris.

« La question des Bourses du Travail resta dans l’oubli, en France du moins, jusqu’au jour où M. Delattre et quelques-uns de ses collègues les firent revivre, en déposant sur le bureau du Conseil municipal de Paris, le 24 février 1875, la proposition suivante :

« Les soussignés demandent qu’il soit procédé à l’étude de l’établissement, à l’entrée de la rue de Flandre, d’une « Bourse du Travail » ou du moins d’un refuge, clos et couvert, afin d’abriter les nombreux groupes d’ouvriers qui se réunissent chaque matin pour l’embauchage des ouvriers du port, et autres. »

« Ce projet, qui n’intéressait qu’un quartier isolé, fut généralisé par la Commission chargée de l’examiner et l’Administration fut invitée à présenter, un projet d’établissement de Bourses du Travail, pour tous les lieux où les ouvriers des divers corps de métiers se réunissent pour s’embaucher. »

« Néanmoins, le 18 juillet 1878, le Conseil vota spécialement la construction d’un abri permanent, boulevard de la Chapelle.

« A la suite de cette résolution, l’organisation des Bourses du Travail demeura en suspens jusqu’au 19 novembre 1883, jour où M. Manier communiqua au Conseil municipal de Paris la décision suivante prise dans une réunion tenue, le 16 du même mois, à la salle Rivoli :

« Considérant que la Bourse du Travail aura au moins pour effet :

« 1° De supprimer les places de grève ;

« 2° De faciliter le placement des travailleurs ;

« 3° De supprimer les bureaux de placement ;

« 4° De centraliser l’offre et la demande, afin de mettre rapidement en rapport travailleurs et travaux ;

« 5° D’établir des rapports directs entre les chambres syndicales ou groupes corporatifs, ainsi qu’entre tous les travailleurs en général, syndiqués ou non syndiqués ;

« L’assemblée, après avoir entendu le développement du projet, invite le Conseil municipal à voter le dit projet dans son ensemble et dans la présente session. »

« Cette pétition provoqua, au Conseil municipal et dans l’Administration, de nouvelles, études et de nouveaux projets, dont la loi du 21 mars 1884, qui accordait aux syndicats professionnels le droit de se constituer librement, vint modifier le caractère primitif.

« Le rapport, présenté par M. Mesureur, le 5 novembre 1886, au nom de la Commission du Travail, sur la création d’une Bourse du Travail à Paris, résume, dans le paragraphe suivant, la manière nouvelle dont cette bourse fut conçue, à partir de ce moment :

« En restant sur le terrain de la liberté des contrats, vous avez le droit sinon le devoir de fournir aux travailleurs les moyens de lutter à armes égales et légales avec le capital ; sans la Bourse du Travail, l’existence des chambres syndicales sera toujours précaire, les charges qu’elles imposent éloignant d’elles le plus grand nombre des ouvriers.

« Il importe donc qu’elles aient des locaux où chacun pourra venir, sans crainte d’avoir à faire des sacrifices de temps et d’argent au-dessus de ses ressources ; la libre et permanente disposition des salles de réunion permettra aux travailleurs de discuter avec plus de maturité et de précision les questions multiples qui intéressent leur industrie et influent sur les salaires ; ils auront pour les guider et les éclairer tous les moyens d’information et de correspondance, les éléments fournis par la statistique, une bibliothèque économique, industrielle et commerciale, le mouvement de la production pour chaque industrie, non seulement en France, mais dans le monde entier.

« Peut-être verrons-nous alors les véritables assises du Travail s’établir. »

« C’est donc pour répondre à ces desiderata multiples que la création d’une Bourse centrale du Travail fut décidée par le Conseil municipal de Paris et qu’une première annexe de cette Bourse fut préalablement établie dans l’ancienne salle de la Redoute, rue Jean-Jacques Rousseau, 35, où elle fut inaugurée le 3 février 1887.

« Quant à la Bourse centrale, elle fut édifiée ensuite rue du Château-d’Eau, près la place de la République, et elle a été inaugurée le 22 mai 1892.

« L’exemple de Paris a été, depuis 1887, suivi par plusieurs villes de province et les Bourses du Travail se multiplient chaque année 1. »

On trouvera encore dans l’Annuaire de la Bourse du Travail, de Paris, quelques renseignements sur la fondation et l’organisation des principales Bourses du Travail de France, savoir :

Les Bourses du Travail :

De Lyon, siège social, 39, cours Morand, fondée le 8 février 1891.

De Saint-Étienne, siège social, 6, place Marengo, le 21 février 1889.

De Marseille, rue de l’Académie, le 22 octobre 1888.

De Béziers, 24, rue de la République, le 5 avril 1891.

Municipale de Bordeaux, 42, rue Lalande, le 1er mars 1890.

Indépendante de Bordeaux, rue du Miroir, le 29 juin 1890.

De Montpellier, 8, boulevard Louis-Blanc, le 29 juin 1890.

De Nîmes, 7, rue Saint-Paul, le 4 mars 1887.

De Cholet, 21, rue Nationale, le 1er juillet 1891.

De Toulon, 51, rue de la République, le 15 octobre 1889.

Etc., etc.



Note

1. Le Placement des Employés, Ouvriers et Domestiques en France, p. 151.


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