Les Bourses du travail


par M. Gustave de Molinari.

Correspondant de l’Institut, rédacteur en chef du Journal des Économistes


Appendice.

Note Z

P. 174. — L’abolition du marchandage.


Le marchandage a été momentanément aboli après la révolution de Février 1848 par le même décret qui diminuait d’une heure la durée de la journée de travail. Voici le texte de ce décret et l’arrêté relatif à son exécution rendu à l’instigation de la « Commission de Gouvernement pour les Travailleurs », instituée le 28 fé­vrier.

Décret du 2-4 mars 1848

Décret qui fixe la durée de la journée de travail et abolit le marchandage.

« Au nom du Peuple français,

« Sur le rapport de la Commission de Gouvernement pour les Travailleurs,

« Considérant :

« 1° Qu’un travail trop prolongé non seulement ruine la santé du travailleur, mais encore, en l’empêchant de cultiver son intelligence, porte atteinte à la dignité de l’homme ;

« 2° Que l’exploitation des ouvriers par les sous-entrepreneurs ouvriers, dits marchandeurs ou tâcherons, est essentiellement injuste, vexatoire, et contraire aux principes de la fraternité ;

« Le Gouvernement provisoire de la République décrète :

« 1° La journée de travail est diminuée d’une heure. En conséquence, à Paris, où elle était de onze heures, elle est réduite à dix ; et en province, où elle avait été jusqu’ici de douze heures, elle est réduite à onze.

« 2° L’exploitation par des sous-entrepreneurs, ou marchandage, est aboli.

« Il est bien entendu que les associations d’ouvriers qui n’ont point pour objet l’exploitation des ouvriers les uns par les autres ne sont pas considérées comme marchandage. »

Le décret des 2-4 mars 1848 fut, à bref délai, suivi de cet arrêté :

Arrêté relatif à la répression de l’exploitation de l’ouvrier par voie de marchandage.

« Sur le rapport de la Commission de Gouvernement pour les Travailleurs ;

« Considérant que le décret du 2 mars, qui détermine la durée du travail effectif et qui supprime l’exploitation de l’ouvrier par voie de marchandage, n’est pas universellement exécuté en ce qui touche à cette dernière disposition ; considérant que les deux dispositions contenues dans le décret précité sont d’une égale importance, et doivent avoir force de loi ;

« Le Gouvernement provisoire de la République, tout en réservant la question du travail à la tâche,

« Arrête :

« Toute exploitation de l’ouvrier par voie de marchandage sera punie d’une amende de cinquante à cent francs pour la première fois ; de cent à deux cents francs en cas de récidive ; et, s’il y avait double récidive, d’un emprisonnement qui pourrait aller de un à six mois. Le produit des amendes sera destiné à secourir les invalides du travail 1. »



Note

1. Le Placement des Employés, Ouvriers et Domestiques en France, p. 117.


Précédent  |  Suite  |  Table des matières  |  Page Molinari  |  Page d’accueil