Les Problèmes fondamentaux de l'économie politique

Études sur la méthode, l'objet et la substance de l'économie politique et de la sociologie

par Ludwig von Mises

Texte établi à partir d'une traduction anonyme inédite
(1933 pour la première édition allemande de l'ouvrage)

Nota : dans la préface de l'édition anglaise, Mises signale qu'il a d'abord employé (en 1929) le terme de sociologie, pour lui substituer par la suite celui de praxéologie.

 

Chapitre premier — Objet et délimitation de la science générale de l'action humaine

C. Science et valeurs

 

1. Le sens de « l'objectivité » comme indépendance par rapport à toute affirmation de valeur

Le fait que l'économie politique s'est constituée à partir des techniques et des problèmes de la politique économique explique que la terminologie dont se servent pour l'exposé de leur doctrine la plupart des économistes a conservé, en matière de valeurs les jugements et les échelles généralement admis par la totalité ou la presque totalité des hommes. Parle-t-on, par exemple, des effets entraînés par les droits à l'importation, on a, du moins on avait autrefois, généralement coutume de se servir d'un mode d'expression répondant à la conviction que les conditions dans lesquelles une dépense déterminée de capital et de travail entraîne la production d'une certaine somme de biens matériels, sont des conditions « meilleures » que celles dans lesquelles la même dépense de travail et de capital ne produit qu'une somme inférieure

A s'exprimer de la sorte, on ne laisse peut-être pas, d'un point de vue purement formel, subsister intégralement le caractère scientifique — indépendant de toute appréciation et de toute échelle de valeurs — de la recherche, mais on ne le diminue nullement quant au fond même. Celui qui prétendrait construire l'économie politique sur des principes différents — sur celui, par exemple, que l'homme doit chercher non pas à augmenter mais à restreindre sa richesse en biens matériels— n'a pas besoin de chercher plus loin que dans la théorie libre-échangiste tout ce qu'il lui faut savoir pour s'engager sur les voies le conduisant à son but. A supposer qu'il veuille construire lui-même une théorie, il ne saurait, à penser rigoureusement, arriver à d'autres résultats qu'à ceux de tous les théoriciens : il lui suffirait de s'expliquer de façon légèrement différente en quelques remarques marginales, en quelques mots intercalaires sans importance pour la doctrine. Comme chapitre spécial de la biologie, la bactériologie ne perd rien de son indépendance à l'égard de toute affirmation de valeurs du fait que les savants qui s'y adonnent visent à combattre l'action microbienne en tant que néfaste à l'organisme où elle s'exerce. Ss théories sont parfaitement objectives, quand bien même se rencontrent dans l'exposé des expressions comme « utile » et « nuisible, » « favorable » et « défavorable. » Elle ne pose ni ne résout le problème de la valeur de la vie et de la santé, et ses résultats sont indépendants de l'appréciation personnelle que le savant porte sur ces biens. Veut-on détruire la vie humaine au lieu de la conserver on tirera, tout autant que le médecin qui veut sauver et non tuer, tout ce qu'on a besoin de savoir de ses résultats théoriques.

On a le droit de penser que les effets « défavorables » relevés à propos des impositions douanières par la théorie libre-échangiste sont compensés par des effets d'autre sorte, ou bien qu'il peut sembler fondé de passer outre à ces effets défavorables. Mais on a alors, si l'on veut penser scientifiquement, à éclairer et à établir de façon aussi précise et évidente que possible, la nature de ces autres effets. C'est alors l'affaire du politique d'arrêter une décision. Et il n'est ici nullement à éviter que l'économiste dise son mot dans la discussion politique. Personne n'est plus compétent que lui pour exposer de façon précise et exhaustive les problèmes qui sont en débat. De son côté, il est vrai, il lui faut toujours faire clairement apercevoir où s'arrête l'exposé scientifique du déterminisme des causes, et où les valeurs en conflit exigent une décision.

La seule chose à éviter est sur ce point de confondre les frontières entre l'exposé scientifique et l'appréciation politique. C'est à cette confusion précisément que se laissent toujours aller tous les esprits qui ne cessent de reprocher à l'économie politique des partis pris politiques, parce que ses exposés de doctrine emploient fréquemment une terminologie qui ne met pas en doute certains systèmes de valeurs généralement reconnues. D'ailleurs, ce genre d'adversaires de l'économie politique ne savent que trop bien qu'ils ne pourraient arriver aux buts de leur politique, s'il leur fallait avouer que les propositions qu'ils formulent, mesurées à ces valeurs généralement reconnues, ne sont rien moins que bienvenues. Les protectionnistes savent parfaitement qu'ils n'auraient aucune chance d'en arriver à leurs fins, si ceux à qui incombe la décision avaient la possibilité de se convaincre que le protectionnisme entraîne une diminution de la productivité. Le sachant, et tenant cependant à imposer un système de protection, ils essaient de démontrer que leur système a aussi ses avantages « du point de vue économique. » Et, comme cette démonstration est impossible, ils reprochent à l'économie politique ses « parti pris politiques. »

2. Science et « technique » : économie politique et libéralisme

Que la science ne vise à la connaissance que pour la connaissance pure, ou qu'elle y vise pour en tirer des enseignements en vue de l'action, ou qu'elle ait ces deux buts en même temps, il est en tout cas légitime de faire profiter l'action des résultats auxquels arrive la recherche scientifique. L'homme ne pense pas que pour penser, mais aussi en vue de l'action. Il ne serait pas besoin d'attirer l'attention sur ces lieux communs sans la littérature politique qui ne cesse passionnément de les mettre en doute sous le manteau de la science.

L'économie politique, en tant que science, est sans doute indépendante des jugements de valeur et ne peut formuler ni de recommandations ni de condamnations. Mais cela n'empêche nullement que nous essayions en fait d'apprendre de l'économie politique quelle direction nous devons donner à notre action pour parvenir à nos buts. Ces buts peuvent sans doute être différents. Caligula, qui souhaitait une seule tête à la totalité du peuple romain pour pouvoir la faire tomber d'un coup, avait d'autres buts en vue que le reste des mortels. Mais de telles exceptions sont rares, et leur instinct de suicide — Caligula n'eut sans doute pas longtemps survécu à la réalisation de son vœu — dispense la réflexion de s'arrêter longuement à examiner leur idéal. Ne serait-ce que pour des raisons biologiques, les hommes, si différents que soient dans le détail leurs désirs, leur volonté et leur appréciation de valeurs, visent cependant, en gros, à des buts identiques. Quelles que soient leurs conceptions philosophiques, leur religion, leur race, leur classe, leur état, leur culture, leurs dons, leur âge, leur santé, leur sexe, ils visent avant toute chose à une vie physiologiquement aussi heureuse que possible. Ils veulent s'assurer le manger et le boire, ils cherchent à se loger, se vêtir, etc., toujours dans la conviction que plus de nourriture, de vêtements, etc. sont préférables à moins de vêtements, de nourriture, et ainsi de suite.

Chaque individu veut s'assurer pour lui et les siens, certaines conditions de santé et d'aisance. Il se peut, ce faisant, que la vie, la santé et l'aisance d'autrui lui restent indifférentes. Il peut aussi être déterminé par un atavisme de bête de proie, penser que les autres sont autant d'obstacles sur sa route, qu'ils lui volent sa place au soleil, et qu'il n'arrivera à la satisfaction de ses désirs que par la destruction ou la dépossession de ses semblables. Mais à ce moment la technologie qui se fonde sur les résultats de la science de l'action humaine lui montre qu'il en va autrement. Le travail accompli selon les principes de la division du travail se révèle plus productif que celui de l'individu isolé. Même quand des hommes de valeur s'associent à d'autres moins doués, qui leur sont décidément inférieurs en puissance de travail, ou en dons physiques et intellectuels, le profit de cette division du travail est un profit réciproque (loi d'association de Ricardo, communément désignée comme lois des avantages comparatifs). L'individu arrive ainsi plus aisément à ses fins par l'association et la division du travail que par un travail solitaire.

Mais la coopération économique ne peut se fonder sur un système de propriété privée des moyens de production. Le socialisme, — le système de la propriété commune de moyens de production — rend impossible tout calcul économique, et est ainsi irréalisable ; l'absurdité du syndicalisme est incontestable, les initiatives interventionnistes sont, considérées du point de vue de ceux-là mêmes qui s'y livrent ou qui les exigent, un contresens illusoire, car les conséquences qu'elles entraînent, loin d'être celles qu'on espère, y sont au contraire diamétralement opposées. Si donc un raisonnement rigoureux, procédant de façon scientifique, arrive finalement à établir qu'un système de propriété privée des moyens de production est la seule forme réalisable d'organisation sociale, il ne faut nullement y voir une apologie du capitalisme ou un essai d'appuyer à tort les exigences du libéralisme de l'autorité de la science. Pour qui soumet les problèmes de l'action humaine à une réflexion scientifique rigoureuse, le libéralisme doit nécessairement apparaître comme la seule politique capable de lui assurer, pour soi et pour les siens, et d'assurer en même temps à autrui, une propriété durable. Ne peut rejeter en bloc les démonstrations du libéralisme comme « entachées de jugement de valeur » que celui qui n'a que faire de ses méthodes, qui ne se propose nullement, pour lui et les siens, vie, santé et prospérité comme fins dernières de son action : que celui qui y préfèrerait la maladie, le besoin et la misère.

C'est là une réalité que méconnaissent foncièrement les tenants des systèmes en honneur de l'étatisme et de l'interventionnisme, lorsqu'ils imaginent qu'accepter le libéralisme ainsi défini, c'est avoir déjà accepté une certaine philosophie 1. Le libéralisme n'est pas affaire de philosophie, de métaphysique, de jugements de valeurs.

Il n'est pas impossible de concevoir des êtres d'apparence humaine animés de la volonté d'éteindre en eux l'humanité et d'atteindre, tuant la pensée et l'action, à une forme d'existence inconsciente et passive semblables à celle du végétal. Qu'il y ait, ou qu'il y ait eu de pareils hommes, la chose n'est pas évidente. Le plus farouche représentant de l'ascétisme, Saint Aegidius n'était pas encore entièrement conséquent avec lui-même, en proposant les oiseaux ou les poissons en modèle à ses disciples. Il eut été plus logique en chantant, comme le Sermon sur la Montagne, la gloire du lys des champs, comme modèle de renoncement absolu, de l'indifférence à l'amélioration de la condition qui nous est faite.

A des hommes de ce genre, à l'ascète logique avec lui-même, qui se voue à la mort par l'ascétisme et l'inaction, nous n'avons rien à apprendre, de même qu'ils ne sauraient rien nous apprendre. Veut-on élever leur point de vue à la dignité d'une philosophie, il ne faut pas oublier d'ajouter que c'est une philosophie inhumaine, car elle conduirait nécessairement l'humanité à sa perte. Notre science ne connaît l'homme que comme un être agissant, non comme une plante à face humaine. Elle n'établit pas autre chose que la nécessité absolue de l'existence de fins, et que le fait que les fins de l'homme, quelle que soit la forme qu'elles prennent dans la diversité concrète, se réalisent plus aisément par l'association et la division du travail que par le travail isolé. (Il est à remarquer que l'on n'a pas osé prétendre que l'expérience historique contredise cette vérité). S'est-on pénétré de ce fait, on doit alors reconnaître que le système de l'économie politique et de la sociologie — et, par là, la doctrine elle-même du libéralisme, qui n'est pas autre chose que l'application de ces théories à l'action humaine — sont absolument dégagés de toute position vis-à-vis de « valeurs. » Toutes les objections élevées contre les « parti pris philosophiques » de l'économie politique, de la sociologie et du libéralisme se révèlent ainsi comme sans fondement, lorsqu'on a compris que la science de l'action humaine n'a d'autre objet précisément que cette même action humaine, qu'elle ne saurait s'intéresser à des êtres enfoncés au jour le jour dans une sorte de vie végétale, et qu'on ne saurait qu'à peine désigner du nom d'hommes.

3. La critique de la méthode individualiste par l'universalisme

L'économie politique se voit généralement reprocher son caractère « individualiste » au nom d'une contradiction posée comme insurmontable entre les intérêts de la société d'une part, et ceux de l'individu l'autre. On affirme que l'économie politique classique et subjectiviste subordonne de parti pris les intérêts de la société à ceux de l'individu, affirmant, ce faisant, le plus souvent, par une méconnaissance volontaire de la réalité des faits, l'harmonie de ces deux ordres d'intérêt. La tâche de la science véritable serait alors de faire voir au contraire que le tout est au-dessus des parties, que le devoir de l'individu est de s'intégrer et de se subordonner à la société, et de sacrifier ses intérêts particuliers et égoïstes à l'intérêt général.

La société apparaît alors comme un moyen voulu par la Providence pour nous conduire à ses fins, qui nous demeurent impénétrables. L'individu doit se soumettre à la volonté providentielle, et lui sacrifier ses intérêts, pour que cette volonté arrive. Son devoir suprême est l'obéissance. Il lui faut se soumettre à ses chefs et vivre selon leurs ordres.

Mais, objecterons-nous d'abord, qui est qualifié pour le rôle de chef ? Car nombreux sont ceux qui prétendent à devenir des dirigeants et à conduire, par des chemins divers, à des buts toujours différents. Les doctrines « collectivistes » ne cessent de railler la théorie libérale de l'harmonie des intérêts, mais elles oublient pour leur part de dire qu'il existe différentes variétés de groupements collectifs et que les intérêts de ces groupements en tant que tels sont radicalement opposés. Lorsque les collectivistes entonnent l'éloge du moyen-âge, de son organisation communautaire, de sa civilisation totalitaire, lorsqu'ils débordent d'enthousiasme romantique pour ses groupements collectifs « où l'individu était enfermé, chaudement tenu et protégé comme le fruit dans son enveloppe » 2, ils oublient par exemple que la papauté et l'empire s'opposèrent pendant des siècles, et que l'individu pouvait se trouver amené à une situation où il lui fallait choisir. Et, quand ils durent livrer leur ville à Barberousse, les bourgeois de Milan étaient-ils vraiment « tenus au chaud et protégés comme le fruit dans son enveloppe » ? De nos jours et en Allemagne, des partis différents ne s'opposent-ils pas passionnément, chacun prétendant pour son propre compte être la seule forme valable d'un gouvernement collectif ? Chaque individu ne se voit-il pas sollicité par le socialisme de classe, par le national-socialisme, par l'Église et par foule d'autres partis, qui lui demandent son adhésion, qui lui prouvent qu'il a sa place dans leurs rangs et qu'il doit combattre avec eux, de toutes ses forces, le collectivisme « trompeur » ?

Un « collectivisme, » qui, en tant que philosophie politique ne présenterait pas une et une seule de ces collectivités comme la seule véritable, en lui subordonnant toutes les autres ou en n'y voyant que des monstruosités, serait illusoire et absurde. Une telle doctrine doit toujours dire à l'individu : voici l'unique réalité qui est et doit être le seul guide de tes pas ; tu dois lui obéir aveuglément et ne te laisser séduire par aucune autre. Elle ne peut se contenter de l'exhorter à sacrifier sa personne et ses intérêts à une collectivité quelconque : il lui faut nécessairement préciser quelle collectivité exige de lui cet abandon de tout son être — et il doit renier toutes les autres. Tout collectivisme ne manque jamais de le proclamer : voici le but qui t'est assigné de façon indiscutable, tel que me l'ont révélé mes voix intérieures : tu dois tout sacrifier à ce but, et, avant toute chose, toi-même. Voici le drapeau sous lequel tu dois combattre jusqu'à ta dernière goutte de sang, sans te soucier d'autre chose. La seule forme d'exposé dont soit capable un collectivisme est celle d'un dogme, et ce dogme celui d'un parti : il lui faut tout autant rejeter tous les autres idéaux qu'affirmer et prôner le sien. Ignace de Loyola ne prêchait pas une croyance quelconque, mais celle du catholicisme romain, Lagarde ne se faisait pas le héraut du nationalisme en général, mais de ce qu'il considérait comme constituant le germanisme. L'Église, la nation, l'État, considérés in abstracto sont des notions n'appartenant qu'à la science nominaliste. Le collectivisme ne divinise que la seule Église véritable, la seule « grande » nation, le seul « peuple élu » — désigné par la Providence pour une mission particulière — le seul État véritable : ils condamnent tout le reste.

C'est pourquoi toute doctrine collectiviste est toujours un appel à la haine inextinguible et à la guerre sans pitié.

Mais la sociologie, par cette doctrine de la division du travail qui est pour elle une pierre angulaire, montre que la contradiction soi-disant insurmontable entre les intérêts de la communauté et ceux de l'individu est sans consistance véritable. L'individu, quels que soient les buts qu'il poursuit, s'il se cantonne dans l'isolement, ou bien est absolument hors d'état de les atteindre, ou bien ne les réalise que dans une bien plus faible mesure qu'il ne le ferait par l'association. Aussi les sacrifices qu'il consent au maintien de la collaboration sociale ne sont-ils que provisoires : il ne renonce à un avantage momentané qu'en vue d'un profit plus durable, résultat du maintien et de l'élargissement de la division du travail social. Aucune société ne se crée ou ne se développe par la subordination forcée de l'individu, contre ses propres intérêts, à l'ensemble du corps social, au nom d'une mystique morale, mais au contraire par l'union consentie des individus en vue d'arriver à leurs buts, en s'assurant ainsi l'avantage de cette plus grande productivité qui résulte de la division du travail. Chaque individu, en tant que tel, ne peut que tirer profit du maintien de la société ; nul ne gagnerait au change qui le ferait se comporter en atome humain errant au hasard, au nom d'un état imaginaire de lutte pour la vie de tous contre chacun et de chacun contre tous, au lieu d'admettre de bonne grâce les liens et les entraves de toutes sortes que comporte la vie sociale : tel est le sens de cette sociologie que l'on veut qualifier d'individualiste et d'atomiste.

Le collectivisme prétend que l' « individualisme » n'aperçoit dans la société qu'une somme d'individus, alors que la société est au contraire une réalité spécifique 3. Mais la science n'a pas à connaître de théories sur l'essence de la société : elle se borne à énoncer des propositions relatives aux conséquences de la collaboration sociale — et la première de ces propositions est sur ce point que la productivité d'une collaboration collective dépasse à tout point de vue la simple somme des résultats auxquels atteignent les individus isolés.

Notre science tire son point de départ de l'action de l'individu, parce que c'est là le seul type d'action dont nous puissions avoir une connaissance immédiate. L'idée d'une société qui pourrait se faire sentir ou se manipuler en dehors de l'action des individus, est une idée absurde. Dans l'action de l'individu, il doit être possible de retrouver la société tout entière. Et que serait cette totalité que chantent en termes mystiques les universalistes, si elle ne se trouvait pas vivante dans chaque individu en tant que tel ? Il n'est pas de groupement social qui se manifeste en dehors de l'action des individus, dirigée vers un certain but. Que serait un « germanisme » qui ne s'exprimerait pas dans l'appartenance au germanisme des individus isolés, une Église, qui ne résulterait pas de l'appartenance des individus à l'Église ?

Spann, le plus éminent représentant de l'universalisme contemporain, souligne avec insistance que les faits que la sociologie a à connaître sont de nature spirituelle et ne sauraient être empruntés à l'expérience, leur nature a priori leur conférant, par rapport à celle-ci, un caractère d'antériorité et de supériorité 4. Cette formule de Spann n'est cependant pas entièrement exacte, en ce sens d'abord que seules peuvent être établies a priori les lois de l'action humaine : l'expérience seule peut, dans chaque cas concret, montrer si s'y présentent en effet les catégories posées par la théorie (le fait que toute expérience suppose un fondement a priori n'a pas à intervenir ici). Que la division du travail demeurerait irréalisable si les hommes ne disposaient pas du truchement du langage, c'est assurément là une évidence a priori. Mais l'existence, tant de la division du travail que de la sémantique, ne peut être établie que par l'expérience. Et l'expérience seule peut nous faire voir qu'il existe, parallèlement les uns aux autres, différents systèmes sémantiques ou, selon une expression plus concrète, différentes langues, et que, de cette coexistence de différentes communautés linguistiques, découlent des conséquences déterminées. Aucune considération a priori, mais bien la seule expérience, établit l'existence entre l'individu et l'humanité comme totalité des hommes, ou une totalité humaine conçue comme état universel, de ces autres totalités qui se déterminent comme nations, races, groupes linguistiques, États.

Aussi bien Spann, lorsqu'il affirme de la sociologie telle qu'il la conçoit qu'elle ne saurait procéder qu'a priori n'entend-il nullement par là un a priori de la réflexion, mais une vision intuitive de la totalité. Le reproche revient constamment, à l'adresse de la science, qu'elle est impuissante à saisir tant la vie et le devenir, que l'être sous l'aspect d'une totalité. La totalité vivante se transforme entre ses mains en fragment privé de vie, la création se dépouille de son éclat et de ses couleurs, l'infinie diversité et le chatoiement de l'univers se dessèche en un pur schéma rationnel. D'où la nécessité d'une science nouvelle, nous apprenant à saisir la totalité comme telle. Seule une telle science serait digne de ce nom ; toute autre n'est qu'une maigre interprétation rationaliste — et mensongère par là, car elle ne saurait accéder à la magnificence de la création.

4. « Totalité vécue » et connaissance scientifique

Liée à la pensée discursive et à l'expérience, la science, il est vrai, ne nous donne pas de l'univers une image unifiée. Elle appréhende le monde sous une forme pluraliste. Elle le ramène à un certain nombre de notions et de lois, qu'il nous faut accepter comme son explication dernière sans qu'il nous soit possible de les lier entre elles en un système véritable. Elle se révèle incapable de combler le fossé qui sépare le système des sciences de la pensée et de l'action humaine de celui des sciences de la nature. Le sentiment et le mouvement, la conscience et la matière, restent pour elle des notions séparées. La vie et la mort, dans leur essence, lui restent des réalités étrangères.

Cette intuition que nous refusent l'expérience ordinaire et la pensée discursive, l'expérience du vivant (das Erleben) nous permet d'y accéder, d'une façon il est vrai différente et sans satisfaire aux mêmes exigences que nous posons à la science lorsque c'est d'elle que nous attendons cette explication dernière. Par la pensée discursive nous ne pouvons saisir la vie et ne pouvons la sentir — notre pensée et notre expérience ne portent jamais que sur des fragments isolés du vivant que l'acte de réflexion, l'expérience, transforment en un résidu mort, non pas sur la vie comme telle, sur la vie comme totalité —  ; mais cette vie nous pouvons l'éprouver, nous en donner le sentiment. Et cette expérience vivante de notre vie est expérience de la vie en tant que telle, expérience de l'unité et de l'indissoluble consubstantialité de toute vie. Nous ne pouvons saisir la totalité par la pensée discursive, mais nous pouvons nous en donner une expérience vivante.

Cette expérience du Tout, de l'Un et de l'Infini est le sommet de l'existence humaine. Nous nous éveillons par elle à une humanité supérieure ; par elle la vie prend tout son sens, cesse d'être un simple écoulement au jour le jour. C'est là une expérience qu'il ne nous est pas donné de faire à toute heure ; il faut des moments d'élection pour nous rapprocher ainsi de l'esprit universel. De tels moments restent rares, mais aussi n'ont-ils pas de prix et ils embellissent de leur éclat la suite monotone des jours, des semaines, des mois et des ans.

L'expérience qu'il nous est donné de faire, dans de tels instants exaltants est notre bien le plus propre et le plus personnel, notre propriété la plus intime. Si personnelle et si intime que nous ne saurions la communiquer à personne, si ancrée dans nos profondeurs qu'elle n'atteint jamais entièrement les régions de la pleine conscience.

Quand devant un être aimé, un aspect de la nature ou dans le mouvement en nous de notre propre force, nous éprouvons, si vivement que ce soit, la puissance de l'incommensurable, c'est là une émotion dont nous ne pouvons définir ni l'essence ni l'origine, ni à autrui ni à nous-mêmes. La totalité garde son caractère ineffable, parce que ni la langue ni le discours ne peuvent s'y appliquer.

L'art n'est en effet qu'une tentative maladroite et insuffisante d'exprimer ce qu'on a ainsi ressenti, d' « informer » ce contenu de l'émotion. L'œuvre d'art n'embrasse pas l'émotion toute entière, mais seulement cette partie de l'émotion pour laquelle l'artiste a su trouver une expression ; cette émotion en elle-même, sa nuance, sa puissance qui montent de nos profondeurs, lui demeurent étrangères. Sans doute l'œuvre d'art peut-elle éveiller une émotion nouvelle chez celui qui s'ouvre à son action. Mais l'émotion qu'elle produit ainsi n'est pas adéquate à celle que l'artiste voulait exprimer. Celui-ci lui donne une musique, une sonorité, une couleur, des mots, une forme, mais non pas l'émotion elle-même ; de notre côté nous faisons plus que simplement ressentir cette musique, cette sonorité, cette couleur, ces mots, cette forme : nous éprouvons l'œuvre en elle-même, et cette émotion est quelque chose d'autre, de neuf, de spécifiquement nouveau. Il en va d'ailleurs de même de toute mystique et de toute métaphysique. Nous en empruntons les mots, l'expression littérale, mais le sens, le contenu vécu ne saurait provenir que de nous. Car nos moyens d'expression et les catégories de notre discours n'atteignent pas à la plénitude, la totalité, la vie ; c'est, comme le disaient les vieux sages brahmanes de l'Inde, ce devant quoi « les mots et les pensées reviennent en arrière, sans arriver à le saisir. » 5

Aussi n'y a-t-il en métaphysique, en art, et dans la mystique ni progrès ni évolution. La reproduction du monde extérieur par l'art peut sans doute être plus ou moins exacte, mais l'essentiel, l'art en lui-même, n'est pas susceptible d'augmentation. L'œuvre la plus primitive peut exprimer toute une intensité d'émotion, nous parler pour peu que nous nous ouvrions à son langage, nous faire accéder à des profondeurs qui resteront à jamais inaccessibles à la science.

Celui qui veut effacer les frontières entre la connaissance scientifique et l'intuition mystique reproche toujours aux sciences discursives de s'en tenir à l'extérieur des objets, de ne pas atteindre à leurs profondeurs. Mais science n'est pas métaphysique, et moins encore mystique : nous ne devons pas attendre d'elle l'illumination et la satisfaction que seule peut procurer l'extase. La science est sobriété et distinction de l'idée — et non ivresse de la vision.

Il est vrai que, comme Bergson surtout l'a établi avec une incomparable clarté 6, un abîme infranchissable sépare la réalité de la vision que la science nous en donne. La science est impuissante à saisir la vie de façon immédiate ; ce qui se laisse prendre dans son système de concepts n'a jamais la structure de la vie 7. Aussi peut-on, si l'on veut, la dire morte, puisque la mort est l'antithèse de la vie. Mais si l'on imagine par là avoir déprécié la science, on fait erreur. On peut en effet la dire morte, mais on ne saurait prétendre qu'elle soit inutilisable. Elle est, au contraire, doublement indispensable : d'abord comme le moyen pour nous, et le seul, d'arriver au degré de connaissance auquel il nous est donné d'atteindre, puis comme l'unique fondement d'une action capable de nous mener à nos fins. Que l'on fasse de la sagesse ou de l'action la valeur la plus haute, dans un cas comme dans l'autre on ne saurait mépriser la science. Elle seule nous ouvre le chemin de la connaissance et de l'action. Sans elle notre existence ne serait pas digne de ce nom.

5. Erreurs de la méthode universaliste

Tous les griefs de l'universalisme contre la méthode « individualiste » de la sociologie et particulièrement de l'économie politique se révèlent ainsi comme sans fondement. La science ne peut procéder de façon autre que discursive ; ses points de départ premiers doivent avoir toute la sûreté dont est capable la connaissance humaine, et il lui faut procéder de là pas à pas, par voie de conclusion logique. A priori, elle peut partir de propositions nécessaires, qui se justifient et se fondent dans l'évidence apodictique ; empirique, elle peut partir de l'expérience. Mais elle ne saurait jamais tirer son point de départ d'une vision intuitive du tout.

Ce serait méconnaître l'essence et le but de la cartographie que d'exiger qu'elle nous montrât, sur les cartes, toute la beauté et la richesse des montagnes et des forêts. La plus brillante description de la magnificence de la nature ne saurait nullement remplacer pour nous une bonne carte : elle ne nous dirait pas le chemin qu'il faut suivre pour arriver où nous voulons. La botanique n'a pas à parler de l'éclat ne de la beauté des fleurs, elle n'a pas à prendre son départ des prairies et des forêts, mais de l'individu végétal, et elle étudie cet individu végétal en bâtissant son système sur la physiologie et la biologie de la cellule végétale.

La conception béhavioriste est ici tout aussi indéfendable que le point de vue épistémologique soutenu par Schumpeter dans son livre sur « l'Essence et le contenu essentiel de l'économie politique comme science » 8. Toutes les analogies mécanistes sont une source d'erreur. Mais, pas plus que la pensée de tous les jours, la pensée scientifiques ne saurait se passer de la catégorie de causalité : c'est là, en effet, la seule catégorie qui ne se laisse pas retrancher de la pensée 9. Une pensée qui ignorerait la causalité ne saurait à aucun degré former l'idée de la divinité et du tout. Que la science soit inséparable de la pensée, c'est ce que personne sans doute ne se risquera à mettre en doute. Mais la pensée doit toujours procéder de façon rationnelle et causale.

La pensée humaine est impuissante à exprimer dans sa totalité le contenu de l'univers. Dans les sciences de l'action humaine, la réflexion nous conduit jusqu'à un point qui marque pour ainsi dire la frontière extrême de notre puissance d'entendement ; passé cette ligne, nous ne pouvons plus qu'établir des états de chose irrationnels, relevant de l'acte de compréhension spécifique des sciences morales.

L'erreur de l'universalisme est celle commise également par bon nombre de penseurs à propos des problèmes de méthode et d'épistémologie relevant des sciences morales : ils ne voient pas que comprendre (verstehen), c'est-à-dire saisir intuitivement la forme et la qualité n'est pas la seule attitude valable dans le domaine des sciences morales, et que, tout au contraire, le fait d'entendre conceptuellement, c'est-à-dire d'appréhender discursivement le sens du donné, doit, en droit et en fait, lui préparer le terrain.

6. Le sens « objectif »

Les systèmes métaphysiques de philosophie de l'histoire se présentent avec la prétention de déchiffrer, derrière les apparences, le sens « véritable » et « exact » des phénomènes, sens qui reste caché aux yeux du profane. Ils se targuent de découvrir le but et les fins derrières de toute réalité terrestre, de l'humanité et de son histoire, ils veulent saisir le « sens objectif » des événements, sens qu'ils affirment différent de leur sens subjectif, c'est-à-dire de celui qu'ils ont pour les individus agissant. Toutes les doctrines religieuses et toutes les philosophies de l'histoire ont sur ce point la même attitude. Le socialisme marxiste et les différentes variétés du national-socialisme et des tendances politiques qui lui sont apparentées en dehors de l'Allemagne, quelle que soit par ailleurs la violence avec laquelle ils se combattent, s'accordent en leur méthode, et il vaut d'être retenu qu'ils découlent tous de la même source métaphysique, à savoir de la dialectique hégélienne.

Pour la science de l'action humaine, il n'est pas pour la connaissance de chemin d'accès capable de lui faire découvrir les intentions insondables de Dieu ou de la Nature. Concernant « le sens du Tout » elle ne saurait fournir une réponse présentant une certitude logique comparable à celle exigée des résultats de la science pour qu'on leur reconnaisse au moins la valeur de vérités provisoires. Elle renonce de son plein gré à pénétrer les arcanes métaphysiques 10 ; le reproche que lui font ses adversaires de s'en tenir à la « surface » ne saurait pas la troubler.

Il est sans doute indéniable que la question par excellence que peut se poser la pensée humaine est celle des vérités dernières. Jusqu'à quel point une telle question est susceptible de solution, la chose n'est pas évidente. De nombreux penseurs, et parmi les plus grands, ont soutenu sur ce point que la pensée et la connaissance dépassent les limites entre lesquelles leur action est valable, lorsqu'elles se tournent vers ces problèmes. Il est en tout cas évident qu'il existe entre les tentatives métaphysiques et la recherche scientifique des différences de point de vue et de principe que l'on ne saurait méconnaître sans danger.

Ce que l'on attend de la science, c'est une analyse rigoureuse des conditions a priori de la connaissance conduisant à faire de ces conditions une synthèse complète, dont les résultats faciliteront l'appréhension des données de l'expérience par la pensée discursive. Mais on ne saurait exiger de la science, ni une vision intuitive des réalités dernières, ni de position ou de décision quant aux valeurs. On peut sans doute considérer la solution des problèmes de cet ordre comme plus haute, plus noble et plus pressante que la tâche plus modeste de la science : constituer un système de relations de cause à effet nous permettant d'organiser notre action de telle sorte qu'elle nous assure la réalisation des buts divers auxquels nous visons. On peut tout aussi bien placer le poète, le voyant et le héraut de valeurs nouvelles au-dessus du serviteur de la science. Mais on ne saurait en aucun cas confondre deux exigences aussi essentiellement différentes, et, comme le voulait Novalis, chercher à « poétiser » la science financière 11.

Métaphysique et science ne se posent pas les mêmes problèmes. Aussi ne peuvent-elles marcher le long de la même route, ni se retrouver dans un même but. Elles pourraient vaquer chacune pour soi et pacifiquement à leurs tâches respectives, car, tant qu'elles restent fidèles à ce qui les constitue en propre, elles ne sont pas exposées à se disputer leur terrain. De telles querelles ne se produisent que lorsque l'un ou l'autre parti se risque à provoquer un incident de frontière. Le positivisme a imaginé qu'en appliquant les méthodes scientifiques aux problèmes métaphysiques, au lieu d'une spéculation incertaine et d'un pur jeu de concepts, il lui deviendrait possible de traiter des vérités dernières avec la même certitude qui caractérise en propre la démonstration scientifique. Il lui a échappé que dès l'instant qu'il se met en devoir de s'attaquer aux problèmes métaphysiques il est nécessairement contraint de faire lui-même de la métaphysique ; aussi sa propre métaphysique, malgré son accent de supériorité à l'égard de toute métaphysique, est-elle en elle-même naïve. Au nom de la métaphysique, d'autre part, et avec des arguments métaphysiques, on ne se lasse pas d'attaquer les résultats bien assurés de la pensée scientifique. Sans doute est-il impossible d'établir scientifiquement qu'un esprit constitué différemment du nôtre ne se formerait pas une autre représentation des choses que celle qui s'offre à notre expérience et à notre perception, et qu'ainsi sa science n'aurait pas un autre contenu que la nôtre. Il nous est précisément impossible de rien établir par le discours de ce que seraient les pensées d'une pensée autre que l'humaine, — d'une pensée surhumaine ou divine. Mais à l'intérieur de l'univers auquel s'applique notre action suivant les directives préalables de notre pensée, les résultats de cette pensée, en tant que scientifique, jouissent d'un tel degré de certitude qu'il serait absurde de prétendre que dans un cadre plus large ou dans un sens plus profond ils pourraient perdre leur valeur et avoir à s'effacer devant une autre connaissance.

Nous n'avons pas ici à nous occuper de la science expérimentale, mais de données scientifiques a priori de la praxéologie, aussi n'avons-nous pas à tenir compte des incursions de la métaphysique sur le terrain de la science expérimentale. Il est évident que les tentatives de la métaphysique en vue de discréditer par ses arguments habituels les résultats de la réflexion a priori, n'ont d'autre but que de remplacer la pensée discursive par l'arbitraire de l'intuition et de l'inspiration. Nulle métaphysique n'est capable d'ébranler la notion de l'action ; aussi la métaphysique ne saurait-elle rien retrancher d'aucune des déductions nécessaires découlant de cette notion. L'on est parfaitement fondé sans doute, lorsque l'on cherche à saisir les conditions de l'action humaine sous l'aspect de catégories à critiquer et, en cas d'erreurs, à rectifier notre façon de procéder, mais uniquement au nom et par les moyens de la pensée scientifique. Aucune théorie métaphysique n'est en état d'ébranler tout résultat de notre pensée qui est passé par l'épreuve de la critique logique. Autant il serait vain de combattre le théorème du binôme par des affirmations métaphysiques, autant il l'est de se refuser à admettre l'une quelconque des propositions de la théorie de la valeur ou des prix, au nom d'une « philosophie » ou d'un « point de vue » différent, celui, par exemple du prolétariat.

Ni la « vision du Tout, » ni l'Universalisme, ni le « sociologisme » ne nous permettent jamais de « comprendre » les phénomènes autrement que sous l'aspect qu'ils revêtent nécessairement pour notre pensée sérieuse. Seule une pensée arithmétique serait fondée à établir, le cas échéant, la contradiction de l'arithmétique pour laquelle trois fois trois font neuf : on ne saurait en tout cas prétendre que dans un sens « supérieur » ou « plus caché » une autre arithmétique ait à valoir.

Les conclusions qui résultent nécessairement des constatations de l'économie politique n'obtiennent pas l'assentiment de ceux dont les intérêts momentanés et immédiats exigeraient que l'on crut à d'autres doctrines : ne pouvant trouver d'erreur dans le système de l'économie politique, ils invoquent pour s'en tirer des forces supra-terrestres.



Notes

1. Cf. par exemple Vlengel, « Probleme der Wertlehre », Archiv für Sozialwissenschaft und Sozialpolitik, tome 68, p. 227. Le libéralisme ne songe nullement à nier l'existence de philosophies de la servilité. Il veut seulement établir que, supposées réalisées les fins auxquelles elles visent, il en résulterait nécessairement des conséquences telles que ceux-là même qui, ignorant ces conséquences, font profession de ces philosophies, trouveraient que c'est alors payer trop cher la réalisation de leur idéal.

2. Cf. Sombart, Der proletarische Sozializmus, 10e édition, Iéna, 1924, volume I, p. 31.

3. Cf. Spann, article « Soziologie » du Handwörterbuch der Staatswissenschaften, 4e édition, volume VII, p. 655.

4. Op. cit.

5. Cf. Denssen, Vedânta, Platon et Kant, Vienne, 1917, p. 67.

6. Cf. Bergson, Évolution créatrice, 7e édition, Paris, 1911, p. 1 sqq.

7. Le fait n'a jamais été mis en doute, même par les sciences empiriques de la nature. Ainsi, Erasmus Darwin : « Following life, in creatures we dissect,/ We lose it, in the moment we detect, » cité par Mill dans sa Logique, op. cit., volume 2, p. 163.

8. Schumpeter, Wesen und Hauptinhalt der theoretischen Nationalökonomien, Leipzig, 1928

9. Cf. Schopenhauer, « Le monde comme volonté de représentation », Œuvres, éditées par Frauenstaedt, 2e édition, Leipzig, 1916, volume II, p. 531.

10. Sulzbach, Die Grundlagen der politischen Parteibildung, Tübingen, 1921, pp. v sqq.

11. Cité par Freyer dans Die Bewertung der Wirtschaft im philosophischen Denken des XIX. Jahrhunderts, Leipzig, 1921, p. 48.


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