par Gustave de Molinari
Dans un article du Forum [1], M. W.T. Harris, commissaire de l'éducation aux États-Unis, se pose la question : Y a-t-il du travail pour tous ? Il met sous les yeux du lecteur des statistiques montrant, pour les États-Unis, le déplacement qui s'est opéré depuis une vingtaine d'années dans les différents ordres d'occupation. Le tableau suivant, par exemple, présente la proportion par mille, de personnes qui s'adonnent à l'agriculture, aux professions libérales, etc., en 1870, 1880, 1890 :
1870 | 1880 | 1890 | |
1re Classe, agriculture, pêche | 491,1 | 460,3 | 396,5 |
2e Classe, professions libérales, etc. | 29,3 | 34,6 | 41,5 |
3e Classe, service personnel | 184,8 | 201,4 | 191,8 |
4e Classe, manufactures | 196,2 | 196,3 | 223,9 |
5e Classe, métiers, commerce | 98,3 | 107,3 | 146,3 |
On remarque qu'environ 100 personnes sur 1000 ont abandonné la première classe (occupations primitives) pour les autres, dans la proportion suivante : 7 p. 100 en faveur du service personnel, 12 p. 100 pour les professions, 27,7 p. 100 pour les manufactures, et 13 p. 100 pour les métiers ou le commerce. Et les produits agricoles continuent à dépasser les besoins de la consommation nationale, par suite des perfectionnements apportés aux méthodes de culture et à l'outillage. La conclusion de M. Harris est que, à supposer que les machines en arrivassent à diminuer de telle sorte le travail manuel (the drudgery), qu'une personne sur 100 fût à même de fournir l'habillement, le vivre et le couvert aux 99 autres, chacune de ces dernières trouverait encore de l'ouvrage dans une autre classe, dans une catégorie plus élevée d'occupation. Songez donc ! Depuis 1870, la proportion des journalistes, par million, a augmenté de 424 à 963, celles des photographes de 608 à 880 ; celle des accordeurs de piano dans les mêmes conditions. Voilà qui est rassurant !
(Rouxel. Revue critique des principales publications économiques. Journal des économistes).
Note