Grandeur et décadence de la guerre


par M. Gustave de Molinari.

Correspondant de l’Institut, rédacteur en chef du Journal des Économistes


Préface

L’absence générale de sécurité apparaît comme le caractère prédominant des premiers âges de l’Humanité. La vie de l’homme est continuellement menacée non seulement par les grands fauves, auxquels il est venu faire concurrence pour l’acquisition de la subsistance, mais par l’homme lui-même. Les plus forts égorgent les plus faibles pour les dépouiller du peu qu’ils possèdent et, à défaut d’autres aliments, se nourrir de leur chair. Plus tard, lorsque les variétés les plus industrieuses de l’espèce ont appris à multiplier leurs moyens de subsistance et commencé l’œuvre de la civilisation, elles disparaissent submergées par des invasions de barbares, qui détruisent cette civilisation qu’elles avaient ébauchée et ne laissent sur leur passage que la désolation et la ruine. Comment, par quel processus cet état de choses a pris fin, comment la sécurité, qui était, à l’origine, la denrée la plus rare, est devenue de plus en plus abondante et s’est répandue, quoique à doses inégales, sur la plus grande partie de notre globe, voilà ce que nous apprend l’étude du phénomène de la guerre. C’est la guerre qui a produit la sécurité, aujourd’hui assurée d’une manière définitive au monde civilisé, et l’accomplissement de cette œuvre a constitué son utilité et sa grandeur. Mais, sa tâche achevée, elle a cessé de répondre à un besoin : après avoir été utile, elle est devenue nuisible. A sa période de grandeur a succédé une période de décadence. Sous l’influence de quels progrès elle finira par disparaître, c’est ce que nous nous sommes proposé de rechercher en écrivant ce livre.


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